La COP28 : enjeux, objectifs et résultats

A quoi sert la COP28 ? Quels sont ses enjeux ? Pourquoi est-elle controversée ? Notre enquête sur cette conférence pour le climat.

DÉCEMBRE 2023

8 MIN

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Actualité : retrouvez tous les enjeux de la COP29.

C’est quoi la COP 28 ?

La 28ème Conférence des Parties sur les changements climatiques, mieux connue sous le nom de COP, se déroule du 30 novembre au 12 décembre 2023 et est organisée par les Émirats arabes unis (EAU). Cette réunion accueille 197 pays et plus de 70 000 participants avec non seulement les dirigeants mais aussi des chefs d’entreprises, des climatologues, des journalistes, de quoi laisser perplexe sur son bilan carbone.

Elle se veut la plus importante depuis celle de Paris en 2015. Son objectif est de faire un bilan sur les mesures prises depuis 8 ans par les États, de les encourager pour renforcer les actions afin de sortir des énergies fossiles, ainsi que d’intensifier les efforts avec une proposition de financement climatique.

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Les controverses autour de la COP28 à Dubaï

Cette conférence est pourtant largement controversée, déjà par sa localisation. Le lieu n’est pas si simple à définir, l’ONU a découpé le monde en différentes parties et chaque année, dans un souci d’équité, un nouveau pays est désigné. La Corée du Sud avait proposé sa candidature mais s’est désistée en 2021 au profit des Émirats arabes unis, apte à accueillir un tel événement.

Pour autant le pays n’est pas le bon élève : il est dans les 7 premiers pays du monde producteur de pétrole, dispose de pistes de ski artificielles en plein milieu du désert, et la plupart de ses magasins et infrastructures sont climatisés.

De plus, les conditions humaines ne sont pas respectées. La construction des installations prévues pour la COP28 en est la preuve : sa construction se fait dans la douleur, les ouvriers migrants travaillent dans des conditions extrêmes, sous plus de 40 degrés.

COP28


Pire encore, le président de la COP 28 n’est autre que Sultan Al Jaber, PDG d’une des plus grandes compagnies pétrolières du pays. Il est de ce fait suspecté de conflit d’intérêt car son rôle de président de la COP pourrait lui donner les clés pour privilégier son secteur de prédilection : les énergies fossiles.

Le bilan carbone de la réunion risque également d’être catastrophique, aux vues des émissions liées aux voyages internationaux, aux hôtels et aux infrastructures. L’exemple le plus flagrant est celui des représentants britanniques : le roi Charles, le Premier ministre Rishi Sunak et le ministre des affaires étrangères David Cameron prendront chacun leur propre jet privé pour se rendre à la conférence.

On peut se demander alors les raisons pour lesquelles les ONG n’ont pas fait le choix de boycotter cette session. Comme l'indique Marine Pouget, porte-parole de Réseau Action Climat :

“C'est très important d'aller là-bas, c'est vrai que ça paraît aberrant, justement parce que c'est aux Émirats arabes unis mais il ne faut surtout pas qu'on y aille pas car on risque de laisser notre place aux lobbying fossiles”

Quels enjeux pour la COP28 ?

Le monde fait face à des défis environnementaux sans précédent. La COP28 s'annonce donc comme un moment charnière dans la lutte mondiale contre le changement climatique, avec pour objectif collectif d’adopter des mesures concrètes pour contenir l’élévation de température à 1,5 degrés Celsius, conformément aux objectifs de l’Accord de Paris. Pour obtenir ce résultat, les émissions mondiales doivent être réduites de près de moitié (43%) d'ici à 2030.

Le premier bilan mondial est donc nécessaire. Simon Stiell, secrétaire exécutif des Nations Unies pour le changement climatique, cite :

“C'est un exercice qui vise à s'assurer que chaque partie respecte sa part du marché, sait où elle doit aller ensuite et à quelle vitesse elle doit agir pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris."

Un bilan, qui, semble-t-il, s’avère plutôt mitigé. L’aspect positif réside dans l'engagement renforcé de nombreux pays à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre depuis plusieurs années, reflétant une prise de conscience accrue de la nécessité d'agir rapidement.

A ce jour, aucun des 195 participants n’a respecté ses engagements. De plus, certains pays font face à des défis internes dans la mise en œuvre de changements significatifs. Ces pays en voie de développement pourraient suffir à enrailler les efforts collectifs et dévier la trajectoire pour limiter le réchauffement planétaire à 1,5 - 2 degrés. La résistance politique et économique à la transition vers des sources d'énergie durables demeure un obstacle majeur.

Promouvoir les énergies renouvelables et sortir des énergies fossiles

“Nous devons faire en sorte d'inclure le rôle des combustibles fossiles. Je sais qu'il existe des opinions fortes sur l'idée d'inclure des formules sur les énergies fossiles et renouvelables dans le texte négocié"

A déclaré Sultan al-Jaber, président émirati de la COP28. Les Emiratis prennent d’autres mesures et souhaitent donner l’exemple, comme le fait de s’engager à doubler ses énergies renouvelables d’ici 2030. Le but est également de mettre en avant l'importance de l'innovation technologique dans la lutte contre le changement climatique qui peuvent permettre d’atteindre ces objectifs ambitieux.

Un discours bien loin d’être suffisant lorsque nous savons que les scientifiques du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) prônent la sortie des énergies fossiles pour limiter les dégâts du réchauffement climatique. Le président évoque tout de même la réduction progressive de la demande et de l’offre de tous les combustibles fossiles sans mentionner l’abolition totale.

La technologie pourrait également servir dans la capture et le stockage du carbone, comme par exemple un projet d’aspirateur géant de dioxyde de carbone des entreprises de pétrole aux Etats-Unis, ou encore la création du premier réseau de transport et de stockage de CO2 en Europe.

Mobiliser des fonds pour soutenir les initiatives climatiques

La mobilisation de fonds pour soutenir les initiatives climatiques dans les pays en développement sera un point de discussion clé, favorisant une transition équitable vers un avenir durable.

De nombreux pays ont annoncé des augmentations significatives de leurs contributions au financement climatique. Ces engagements visent à soutenir les efforts mondiaux pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris. Dans les faits, les engagements pris par les pays lors des précédentes COP n’ont pas été respectés : 100 milliards de dollars par an ont été promis aux pays en développement par les pays riches en 2009, alors que seuls 83 milliards de dollars auraient été financés, d’après l'OCDE en 2020.

La France a par ailleurs rappelé le 7 novembre qu’elle investira 1 milliard d’euros pour aider l’Afrique du Sud à sortir du charbon.

Cela semble bien loin des montants estimés par un groupe d’experts des Nations unies, qui pense que plus de 2 000 milliards de dollars seraient nécessaires chaque année pour aider les pays à s’adapter aux changements climatiques.

Dédommager les pays les plus vulnérables avec le fond des pertes et préjudices

Les pays vulnérables sont impactés par les catastrophes climatiques toujours plus nombreuses sur leurs territoires. Augmentation du niveau de la mer, évènements climatiques extrêmes, les conséquences sont souvent inévitables et dramatiques.

Pour autant, ils ne sont pas forcément les plus responsables de leur situation bien au contraire. Déjà obtenue difficilement lors de la COP27 en Egypte, la question de la compensation des pertes et dommages sera de ce fait un des points phares de la COP28.

Ces besoins sont estimés à 580 milliards de dollars par an. Alors, à qui revient cette dette ? A ceux responsables historiquement du réchauffement climatique ou à ceux concernés par ces changements ? Un comité a été spécialement dédié à cette question, Stéphane Crouzat, ambassadeur français du Climat indique que

“Ce ne sera pas que les pays dits développés, mais ça sera aussi ouvert à tous ceux qui peuvent le faire"

Il faudra donc un effort international et une solidarité renforcée. Les discussions futures devront se concentrer sur le développement de solutions pratiques pour atténuer les pertes et préjudices. Cela peut inclure des stratégies d'adaptation spécifiques et des partenariats internationaux renforcés.

L’essentiel des accords de la COP28

Quel est le bilan de cette COP ? Quelles sont les décisions finales ? On vous a résumé les 4 grandes décisions de la 28ème Conférence des Parties sur les changements climatiques.

Les énergies fossiles mentionnées

Le tabou est-il enfin levé ? L’accord final de la COP28 mentionne les énergies fossiles pour la première fois depuis le début de ces réunions. Les mots sont cependant bien choisis, puisque le texte stipule que le monde doit «transitionner hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, d'une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l'action dans cette décennie cruciale, afin d'atteindre la neutralité carbone en 2050»

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Le but est d'atteindre une sortie de l’ère des énergies fossiles d’ici le milieu du siècle, conformément aux préconisations scientifiques pour ne pas dépasser 1,5 °C de réchauffement climatique. La mention de ces carburants apparaît deux fois dans le texte, et, même si l’expression “phase out”, c’est-à-dire une transition et non une sortie définitive, a été minutieusement choisie, le fait de s’attaquer au charbon, au pétrole et au gaz reste une première victoire.

Le charbon est le combustible fossile le plus polluant, 1,5 fois plus que le gaz et 1,3 fois plus que le pétrole. Pour autant, il est encore massivement implanté en Asie. La France a elle, brillé lors de la COP28 par son exemplarité en annonçant que ses deux dernières centrales à charbon seront fermé d’ici 4 ans.

Aller plus loin avec les énergies renouvelables

Pour compléter la première partie sur la sortie des énergies combustibles, le texte final de la COP28 se donne l’objectif mondial de tripler la capacité des énergies renouvelables et de doubler le rythme d'amélioration de l’efficacité énergétique d’ici 2030. Selon les experts, cet objectif est ambitieux mais atteignable, grâce notamment au développement massif d’énergies renouvelables ces dernières années. Cet objectif est également nécessaire à la transition vers une énergie plus verte pour faire face à la demande énergétique exponentielle du monde.

L’inquiétude se fait cependant ressentir sur cette décision par les ONG, notamment à propos du rôle “d’énergies de transition” sous entendant une longévité du gaz. L'argument phare des pays développés sur ce sujet est d'assurer la “sécurité énergétique” des pays en développement.

Capture et stockage de carbone

Cette solution est massivement soutenue par les pays producteurs de pétrole qui peuvent leur permettre de continuer l’extraction d’hydrocarbure. Les dirigeants de ces pays soulignent l’importance et le grand succès de l’intégration de ces solutions technologiques dans le texte du bilan mondial de la COP28, pendant que d’autres s’en désolent. En effet, le GIEC précise également que ces solutions sont nécessaires, mais, à moindre mesure et ne permettront pas à elles seules d'atteindre la neutralité carbone. De nombreuses ONG ainsi que des pays s'en insurgent, dénonçant cette mention comme inquiétante, la nommant même de "distraction" permettant aux industries pétrolières de continuer leurs activités en s'appuyant sur la technologie.

Les promesses financières

Le bilan mondial réalisé lors de cette conférence sur l’état des financements accordés depuis les Accords de Paris ne satisfait pas. Les fonds ne sont pas suffisants, et cela ne risque pas de s’améliorer. La mise en œuvre de fonds destinés à compenser les pertes et dommages des pays vulnérables face aux changements climatiques des prochaines années est cependant conservée.

Cependant, les comptes n’y sont pas. Les pays les plus développés, souvent également les plus responsables historiquement de l’accélération de la situation climatique, ont tout fait pour échapper à leurs responsabilités financières. A titre d’exemple, les Emirats Arabes Unis, la France ainsi que l’Allemagne ont décidé de contribuer au fonds à hauteur de 100 millions d’euros alors que les Etats-Unis se sont engagés à verser 17 millions.

La COP28 tire un bilan mitigé : malgré une avancée inédite dans ses décisions, la rendant la plus importante depuis les Accords de Paris comme souhaité, le choix des mots utilisés dans le bilan donne l’impression d’un manque d'engagement profond de la part de certaines nations. Nous devrons cependant nous contenter de ce “pas en avant” d’ici l’an prochain. Le président Emmanuel Macron en tire la conclusion :

“L’accord de Dubaï est une étape importante. Il engage le monde dans une transition sans énergie fossile, en triplant les renouvelables et en reconnaissant le rôle clé du nucléaire. C’est une première et une avancée pour le respect de l’accord de Paris. Accélérons !"

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