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Un des objectifs pour protéger l'environnement est d'atteindre les objectifs d'économies bas carbone. Tous les acteurs doivent faire leur part.
En juin 1992 a lieu le sommet de la Terre à Rio de Janeiro (Brésil). C’est à cette occasion qu’a lieu la prise de conscience collective de la nécessité d’agir pour protéger l’environnement. Un an plus tard, l’économiste japonais Yoichi Kaya formalise par une équation mathématique – l’équation de Kaya – le défi auquel est confrontée l’humanité pour réduire l’émission de gaz carbonique.
L’équation de Kaya se définit comme le produit des ratios suivants : CO2 = population x (PIB/population) x (énergie/PIB) x (CO2/énergie). Concrètement, Kaya nous dit qu’il existe essentiellement trois leviers principaux pour réduire les émissions de gaz carbonique et atteindre nos objectifs d’économie bas carbone.
Le premier levier consiste à diviser la production par habitant par quatre au niveau mondial.Cela supposerait un choix délibéré de récession.
Historiquement, il est prouvé qu’une récession est une bonne nouvelle pour le climat. Si on remonte jusqu’aux années 1850, on constate qu’un cycle d’expansion économique induit une hausse moyenne de 12 % des émissions de gaz à effet de serre.
Dans une phase de récession (qui dure en moyenne 1,5 ans depuis 1854), les émissions diminuent d’environ 2,3 %. Toutes les récessions ne se valent pas, toutefois. L’impact sur les émissions dépend fortement de l’ampleur et de la durée de la récession. Celle qui a été provoquée par le premier confinement mondial de mars 2020 n’a entraîné une baisse des émissions que de 1,2 % – assez peu finalement.
Même si nous faisons le choix volontaire de la récession (ce qui est impensable), rien ne garantit que la baisse des émissions soit suffisante.
Le deuxième levier est tout aussi improbable, c’est la baisse de la population mondiale (division au moins par trois). Ce n’est pas la direction vers laquelle nous allons. La population mondiale a dépassé le seuil symbolique des 8 milliards d’habitants cet automne.
Même en envisageant une politique de l’enfant unique au niveau planétaire (ce qui serait le choix certainement le moins coercitif pour atteindre l’objectif annoncé), il est peu probable que cela soit suffisant. C’est donc exclu.
La troisième solution est plus réaliste. Elle implique de diviser l’intensité énergétique (c’est le rapport entre la consommation d’énergie d’un pays et son PIB) par dix ans en quarante ans.
Cela suppose d’agir sur deux plans. Au niveau de la demande, cela implique de moins consommer et de mieux consommer. C’est la sobriété énergétique. Au niveau de l’offre, il s’agit de travailler sur l’efficacité énergétique et de canaliser les financements vers les énergies moins émettrices de gaz carbonique. Les énergéticiens travaillent déjà sur l’efficacité énergétique.
Prenons l’exemple d’une salle de cinéma. À elle seule, la ventilation représente 90 % de la consommation énergétique. Grâce à l’installation de capteurs dans les salles et à l’utilisation de l’intelligence artificielle pour effectuer un suivi en temps réel des installations, il est possible de réduire la consommation énergétique d’au moins 30 % en moyenne.
Avec un système quasiment identique, le métro de Barcelone (plus de deux millions d’usagers par jour) a pu réduire sa consommation énergétique d’ampleur similaire et sa facture d’électricité d’environ 1,5 million d’euros en un an. C’est bon pour le porte-monnaie et c’est bon pour la planète.
Mais ce n’est pas suffisant. Diminuer l’intensité énergétique nécessite aussi de canaliser les financements vers les sources d’énergie bas carbone (hydraulique, biomasse, solaire, éolien etc.).
Le secteur public joue un rôle moteur à cet égard. Nous pouvons l’envisager sous deux angles principaux.
Le premier suppose de verdir les dépenses existantes ou à venir. La France n’est pas en reste dans cette perspective. Depuis 2020, un budget vert est adossé à la loi de finances. C’est unique au monde. Cela permet de classer les dépenses budgétaires et fiscales selon leur impact sur l’environnement et d’identifier des ressources publiques à caractère environnemental.
Six objectifs environnementaux sont retenus : atténuation du changement climatique, adaptation au changement climatique, gestion de la ressource en eau, réduction des déchets, lutte contre les autres pollutions, protection de la biodiversité et des espaces naturels.
Pour chacun d’eux, tous les programmes budgétaires, ou les actions à un niveau plus fin, se voient attribuer une « pastille » de couleur verte (dépense favorable à l’environnement), grise (dépense neutre) ou marron (dépense défavorable à l’environnement). La bonne nouvelle, c’est que la part verte est en augmentation constante depuis trois ans si on regarde à périmètre identique. Entre 2022 et 2023, une hausse de 15 % est actée.
Mais ce budget reste encore expérimental. Beaucoup de dépenses sont non cotées (impossible d’attribuer une « pastille ») ou grises (donc neutres). Par ailleurs, certains choix de politique publique sont nécessaires à court terme du point de vue social mais négatifs pour l’environnement.
C’est le cas du bouclier tarifaire qui pourrait perdurer, dans le principe, jusqu’en 2027 selon la loi de finances pour 2023. Cela représente juste pour l’an prochain une hausse des dépenses du côté brun de 8,9 milliards d’euros.
Cela montre que le verdissement des dépenses publiques n’est pas linéaire. En fonction des évènements, il peut y avoir des retours en arrière. Ce qui compte à la fin, c’est qu’une trajectoire d’amélioration soit tracée.
Enfin, on peut regretter qu’aucun objectif opérationnel à moyen terme n’ait été fixé pour supprimer les dépenses de couleur marron et augmenter les dépenses vertes jusqu’à une cible optimale du point de vue socio-économique (l’idée n’étant évidemment pas de prendre des décisions budgétaires pouvant entraîner une nouvelle crise des Gilets jaunes). C’est certainement l’aspect sur lequel il faudra le plus travailler dans les années à venir.
L’État a incontestablement un rôle moteur dans la conduite du changement. Mais l’espoir le plus grand réside certainement dans l’action au niveau local.
Pour faciliter la transition vers une économie bas carbone, les énergéticiens parlent des 3D pour Digitalisation, Décarbonation et Décentralisation. Ce dernier aspect vaut aussi pour la canalisation des financements.
C’est au niveau local qu’on peut avoir l’adhésion la plus forte des citoyens - un enjeu crucial pour la transition vers une économie bas carbone. Selon l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) qui a été fondé par la Caisse des dépôts et l’Agence française de développement, les collectivités locales sont responsables de 15 % des émissions de gaz à effet de serre nationales (et même jusqu’à 50 % si l’on considère les effets indirects de leurs orientations).
Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, elles vont devoir dépenser au moins 22 milliards d’euros par an entre 2024 et 2028. C’est en moyenne le double de ce qui est alloué jusqu’à présent pour l’environnement. Cet objectif suppose des investissements audacieux et des financements conséquents.
On pourrait croire que la difficulté va être de trouver des financements. Ce n’est pas le cas. L’État comme les collectivités locales empruntent à des taux d’intérêt encore très bas si on se réfère à ce qui prévalait il y a dix ans de cela.
L’enjeu consiste plutôt à mesurer et à anticiper les dépenses en faveur de la transition écologique.
Nous sommes dans une phase de test et d’apprentissage. Comment mesurer le montant des investissements pluriannuels qu’il faut envisager ? Comment savoir quoi prioriser entre la rénovation du bâti ou la mise en place de la mobilité électrique ?
Cela implique de collecter des données et de construire collectivement des proxys permettant d’utiliser une méthodologie unique.
C’est justement le travail auquel se consacre l’I4CE. Un groupe pilote d’une dizaine de collectivités devrait voir le jour dès 2023 pour mesurer au mieux les projets qui doivent être portés dans le cadre de la transition écologique, pour savoir comment les mettre en œuvre du point de vue financier et faire adhérer la population locale.
L’Etat et les collectivités ne peuvent pas tout faire. Le secteur privé doit aussi prendre sa part des choses.
En l’occurrence, c’est le signal prix qui compte. Confrontées à des droits à polluer qui sont désormais à un niveau prohibitif (la tonne de carbone est désormais au-delà de 100 euros), les industries les plus polluantes, comme le secteur minier, cherchent à tout prix à compenser leurs émissions de carbone.
Financièrement, c’est une stratégie plus intéressante pour elles que d’acheter des droits à polluer. Elles optent souvent pour la reforestation comme solution de compensation. Et c’est tant mieux !
Si nous plantons massivement des arbres, cela va permettre de capturer en grande quantité du carbone et de gagner du temps sur le délai de décarbonations. Supposons que les arbres participent à hauteur de 20 % à 30 % à nos efforts pour réduire les émissions, cela implique de planter plusieurs dizaines de milliards d’arbres par an.
L’institut polytechnique de Zurich a publié une étude en 2019 montrant qu’on pourrait en planter 900 milliards sans toucher aux activités agricoles. Même en partant sur un objectif plus raisonnable d’un tiers, à 300 milliards d’arbres, cela aurait déjà un impact notable sur le processus de décarbonations. Nous ne sommes pas condamnés à l’inaction. Le champ des possibles est vaste, comme on le voit, pour éviter le pire.
Cet article a été rédigé par Christopher Dembik. Christopher Dembik est économiste. Il est directeur de la recherche macroéconomique pour le Groupe Saxo Bank, en France et à l’étranger. Il est aussi membre du conseil d’administration de la société cotée Substrate Artificial Intelligence et conseiller financier de la start-up Oceans.ai(inspection et maintenance d’installations industrielles). Depuis 2022, il est maître de conférences à Sciences Po Paris et éditorialiste sur BFM Business. Il a reçu le Prix de meilleur prévisionniste pour la France en 2015 (Thomson Reuters) et pour l'Allemagne en 2019 (Refinitiv).
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