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Quoi de plus facile que d’ouvrir une boîte de thon pour agrémenter un plat. Les Français en raffolent, ils en consomment d’ailleurs en moyenne 4,9 kg par an et par personne (en équivalent poids vif). Mais quel est l’impact de cette habitude pour notre santé ?
En octobre 2024, l’ONG Bloom a analysé 148 boîtes de thon achetés dans divers marchés en France et dans quatre autres pays européens et le verdict est sans appel : toutes sont contaminées au mercure.
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Le mercure est libéré dans l’atmosphère par des sources naturelles, comme les éruptions volcaniques et les feux de forêt, ainsi que par des activités humaines, principalement la combustion de charbon et l’exploitation de certaines mines d’or. D'après le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), en 2018, les émissions mondiales de mercure d’origine humaine atteignaient 2 500 tonnes, représentant aujourd’hui 90 % du mercure atmosphérique.
Ce mercure est ensuite absorbé par les océans, où il se dépose et se transforme en méthylmercure en entrant en contact avec des bactéries. Ce dérivé est encore plus toxique et s'accumule dans les organismes des poissons, dits "bio-accumulateurs". Les poissons en consomment au fur et à mesure de leur croissance et retiennent ce méthylmercure dans leurs tissus.
Le thon, en particulier, concentre davantage de mercure en raison de sa position de superprédateur au sommet de la chaîne alimentaire marine. Ce processus, appelé bio-amplification, signifie que le thon ingère d'autres poissons déjà contaminés au méthylmercure, ce qui augmente de façon exponentielle la quantité de toxines dans son organisme. Par rapport aux espèces situées en bas de la chaîne alimentaire, le thon stocke ainsi des quantités de mercure bien plus élevées, ce qui représente un risque pour la santé des consommateurs.
L’absorption même de faibles quantités de méthylmercure présente de sérieux risques pour la santé. Une fois ingéré, ce composé toxique passe dans le sang et se propage aux organes, y compris le cerveau, où il peut entraîner des troubles neuronaux, cardiovasculaires, immunitaires, rénaux et reproductifs. Son impact est particulièrement dangereux pour le développement cérébral des fœtus, exposant les femmes enceintes à un risque accru.
Chez les adultes, l'exposition au méthylmercure provoque divers symptômes graves : engourdissements, troubles visuels, perte de motricité et de coordination, problèmes de concentration et de mémoire, anxiété et déclin intellectuel. Une étude de la revue Toxics souligne même que des doses élevées peuvent conduire à la cécité et à la surdité.
Le corps humain élimine difficilement le méthylmercure. Le sang met environ deux mois pour réduire de moitié sa concentration en mercure, tandis que le cerveau peut nécessiter des années, pour éliminer cette toxine, d'après une étude de Toxicology and Applied Pharmacology. Chez les consommateurs réguliers de thon contaminé, le méthylmercure s'accumule donc durablement.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe le mercure parmi les dix substances les plus préoccupantes pour la santé publique, et le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) le considère comme cancérigène probable.
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Pour bien comprendre les enjeux, il est d’abord capital de comprendre les différentes normes qui s’appliquent concernant la teneur en mercure dans les produits de la mer. La teneur maximale autorisée dépend de la place du poisson dans la chaîne alimentaire : s’il est en début de chaîne alimentaire (et donc s’il reste peu dans l’eau), sa teneur en mercure est plus faible que s’il est en bout de chaîne alimentaire.
Ainsi, il existe 3 seuils en fonction du type de produits de la mer :
maximum 0,3 mg de mercure par kilogramme de poids frais pour les petits poissons en début de chaîne alimentaire (sardine, cabillaud, anchois, …)
maximum 0,5 mg de mercure par kilogramme de poids frais pour les autres poissons à l’exception des super prédateurs
maximum 1 mg de mercure par kilogramme de poids frais pour les grands prédateurs (thon, requin, espadon, …)
Si les poissons dépassent la norme qui leur est associée, ils ne peuvent être mis sur le marché. Toutefois, il existe plusieurs critiques des ONG :
Tout d’abord la dangerosité du mercure est la même quel que soit le type d’aliment dans lequel on le trouve. Ainsi, les ONG dénoncent des normes qui favorisent l’économie (avec des normes faites pour pouvoir vendre facilement les poissons pêchés) au détriment de l’impact pour la santé
De plus, pour produire un aliment en boîte, la chair du poisson est cuite et elle perd de l’eau. Ainsi, la teneur en mercure se concentre dans les chairs, avec des teneurs en mercure pouvant aller à 2 ou 3 mg par kilogramme de thon en boîte !
Au-delà des normes établies par aliment et pour limiter la contamination au mercure, les autorités sanitaires européennes ont établi une « dose hebdomadaire tolérable » (DHT) de mercure, fixée à 1,3 µg de méthylmercure par kilogramme de poids corporel. Cette limite vise à protéger la population des effets toxiques du mercure.
Toutefois, cette DHT peut rapidement être dépassée. En effet, enfants et adultes excèdent cette dose dès la consommation d’une seule boîte de thon de 100 g contenant 1 mg de mercure par kilogramme.
Cela montre à quel point même de petites quantités de poissons contaminés peuvent augmenter le risque d’exposition au méthylmercure.
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Les résultats de l’enquête sont sans appel : toutes les boîtes sont contaminées au mercure, et plus d’une sur deux (57 %) dépassent la limite maximale de 0,3 mg/kg fixée pour d'autres espèces de poissons.
Parmi l’échantillon, 15 boîtes dépassent même la norme de 1 mg de mercure par kilogramme fixée pour le thon. Le record est atteint par une boîte “Le thon blanc au nature” de la marque Petit Navire achetée dans un magasin Carrefour à Paris : 3,85 mg/kg !
En conclusion, la présence élevée de mercure dans le thon soulève une réelle inquiétude pour la santé publique. Les résultats de l’enquête de Bloom mettent en lumière les dangers d’une consommation régulière de ce poisson superprédateur, qui peut conduire à une accumulation de méthylmercure dans l'organisme avec des effets graves, notamment sur le système nerveux et le développement cérébral des fœtus. Face à ce constat alarmant, il devient urgent que les autorités sanitaires et les consommateurs prennent des mesures pour limiter l’exposition à cette toxine. Réduire la consommation de thon et diversifier les sources de protéines marines, tout en renforçant les normes de sécurité alimentaire, pourrait contribuer à minimiser les risques pour la santé.
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Sources :
Bloom - Du Poison dans le poisson : chronique d’un scandale de santé publique https://bloomassociation.org/wp-content/uploads/2024/10/rapport-Mercure-FR.pdf
Blom - Résultats détaillés des analyses de BLOOM sur 148 boites de thon https://bloomassociation.org/wp-content/uploads/2024/10/241024_Resultats-boites.pdf
Science et Avenir - Du poison dans le poisson : les ONG Bloom et Foodwatch révèlent la contamination des boîtes de thon au mercure https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/du-poison-dans-le-poisson-les-ong-bloom-et-foodwatch-revelent-la-contamination-des-boites-de-thon-au-mercure_181897
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